The Nits



Ce n'est pas forcément parce que la Finlande est le fil conducteur de leur dernier album que les Nits reviennent de loin. Séparé de son clavier quasiment originel, le groupe a dû se trouver une nouvelle unité et "Alankomaat" en témoigne superbement avec une mélancolie pas entendue depuis "Ting".

Il y a dans votre nouvel album, un fort sentiment de mal du pays...
Henk Hofstede : Peut-être parce que plusieurs de ces chansons ont été écrites vers 1996, l'année où le groupe a arrêté. Après quinze ans passés ensemble, notre clavier Robert Jan Stips voulait écrire, chanter et jouer ses propres morceaux avec un autre groupe. Nous avons décidé de faire une dernière longue tournée et de nous séparer. C'était comme si je visitais pour la dernière fois tous ces pays, la Suisse, la Finlande, le Canada. Les chansons que j'ai écrites alors se sont imprégnées de cette atmosphère.

Vous avez deux nouveaux éléments féminins dans le groupe. Comment se passe leur intégration scénique ?
Il est très rafraîchissant de rechanter de vieilles chansons avec ces dames qui revisitent notre discographie. Les versions changent beaucoup. Le groupe n'a réellement redémarré qu'en janvier dernier et nous répétons encore souvent.

Tu sembles avoir un point de vue assez négatif sur la Suisse dans une chanson comme Hold me Geneva
Je ne connais que des Suisses qui ne sont pas nés dans leur pays. Je me demande d'ailleurs s'il existe des Suisses d'origine. Ils viennent tous de France et d'Amérique. Tous ont un peu honte de leur pays à cause du scandale de l'argent juif pendant la Seconde Guerre Mondiale. Ils aimeraient bien que la modernité entre dans leur pays mais c'est un peu comme une île où les étrangers se reposent. Nabokov y a écrit ses plus grands livres, David Bowie y vit et Queen y a enregistré pas mal de disques (rires).À chaque nouvelle sortie des Nits, on se demande si vous allez accéder à l'énorme notoriété que vous méritez, mais ce n'est jamais le cas. Comment expliques-tu cela ?

Pour une raison bien simple : la gloire et la fortune ne nous intéressent pas. Les disques que nous faisons ressemblent exactement à ce que nous avons dans l'idée et nous ne voulons rien changer à cela.

Il semblerait que vous ayez eu quelques problèmes avec Paul Simon à cause de la chanson Robinson...
Ce n'était pas très agréable. Au départ, c'était un collage avec des paroles de Paul Simon tirées de Mrs Robinson. La chanson avait été enregistrée et mise en boîte quand j'ai reçu une lettre m'apprenant que "Monsieur Simon n'était pas intéressé par le projet de Monsieur Hofstede". J'avais bien pris la précaution de lui envoyer une cassette de la chanson et un courrier précisant toutes les histoires de droits d'auteur. J'ai trouvé cela assez honteux, d'autant plus que c'était quand même un hommage à Paul Simon dont j'aime vraiment beaucoup l'oeuvre. Disons au bénéfice du doute, que son entourage n'est vraiment pas compréhensif. Le résultat a été qu'il a fallu modifier la chanson, ce qui l'a desservie.

Il y a plusieurs intervenants finlandais dans "Alankommat"...
En règle générale, j'aime beaucoup les chants de ce pays et je suis vraiment tombé en admiration devant Wimme qui chante sur H.O.M.. C'est très traditionnel mais en même temps, vraiment étrange.

Comment décrirais-tu le "blues de Helsinki" dont il est question dans Soul man ?
C'est difficile à décrire, mais tous les Finlandais le ressentent. L'anecdote que raconte dans la chanson, Seppo, mon ami finlandais, a été légèrement adaptée. En fait, il y a une dizaine d'années, il était un soir avec Allen Ginsberg et ils n'ont pas pu entrer dans un restaurant chic parce que le poète ne portait pas de cravate. Cela a un peu changé aujourd'hui et l'on peut presque parler de "swinging Helsinki". Les Finlandais sont très étranges : ils ne se considèrent même pas comme scandinaves. Le titre de notre album "Alankomaat" est du finlandais. Il y a douze ans, lors de la première tournée des Nits dans ce pays, je voulais envoyer une carte postale chez moi et j'ai demandé comment on disait "Pays-Bas" en finlandais. C'était ce mot, je le trouvais tellement beau qu'il est finalement devenu un titre d'album.




par Christophe Despaux / Photo : Stéphane Burlot



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